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La désinformation en santé est un phénomène alarmant qui n’a cessé de croître avec l’essor des réseaux sociaux et des nouveaux moyens de communication.
Bien qu’elle ait toujours existé, la pandémie de Covid-19 a agi comme un catalyseur, révélant l’ampleur et la dangerosité de cette désinformation pour la santé publique. Les retards de vaccination, les traitements inadaptés et la défiance envers les experts scientifiques ont accentué les risques, rendant le problème plus visible. Le défi posé par cette désinformation va au-delà de la médecine, touchant également les sphères sociales et démocratiques.
Un phénomène viral qui ne se cantonne pas à la sphère numérique
Les fake news trouvent un terreau fertile dans la viralité des réseaux sociaux. Grâce à des algorithmes qui favorisent la diffusion rapide, les informations erronées, tout comme les vérités, se propagent massivement. Pendant la crise du Covid-19, des rumeurs et fausses informations sur des traitements miracles ou des risques supposés liés aux vaccins ont conduit à des tragédies, avec des décès directement imputables à ces croyances. De nombreuses personnes ont renoncé à des traitements validés, retardé leur vaccination, ou ont été attirées vers des alternatives non prouvées. Ces exemples illustrent la capacité dévastatrice de la désinformation lorsqu’elle influence les décisions médicales des individus.
Confusion entre bien-être et soins médicaux
Un des défis majeurs de la désinformation en santé réside dans la frontière floue entre les pratiques de bien-être et les soins médicaux traditionnels. Dans un contexte où le bien-être est de plus en plus recherché, certaines pratiques sont souvent perçues comme des alternatives viables aux traitements conventionnels. Cependant, si certaines pratiques de bien-être peuvent améliorer la qualité de vie des patients, elles deviennent dangereuses lorsqu’elles se substituent à des soins basés sur des preuves scientifiques. Il est donc essentiel que les patients soient informés et responsabilisés pour comprendre la différence entre des pratiques de bien-être inoffensives et des soins qui nécessitent un suivi médical.
La formation des professionnels de santé, un rempart contre la désinformation
Les professionnels de santé sont en première ligne dans la lutte contre la désinformation. L’importance de former les soignants à répondre aux interrogations des patients de manière claire, tout en s’appuyant sur des preuves scientifiques est une certitude face à ce phénomène. Cette formation est d’autant plus cruciale que, selon le collectif, près de la moitié des dérives sectaires signalées aujourd’hui en France sont liées à des questions de santé.
Les soignants doivent également être capables d’identifier les signaux d’alerte de ces dérives, qui peuvent avoir des conséquences désastreuses pour les patients.
Le numériques et l’intelligence artificielle : une réponse innovante
La désinformation tire parti des réseaux sociaux pour se propager rapidement, mais ces mêmes technologies peuvent également être mobilisées pour la combattre. Le numérique et l’IA sont des outils puissants qui, lorsqu’ils sont bien utilisés, permettent d’identifier rapidement les fausses informations et d’en limiter la diffusion.
L’analyse des réseaux sociaux permet de retracer l’origine d’une rumeur, d’étudier sa propagation et de comprendre les mécanismes qui la rendent virale. L’IA, de son côté, peut aider à détecter des signaux faibles et à identifier les narratifs trompeurs avant qu’ils ne se généralisent. Pour que ces outils soient efficaces, il est cependant nécessaire de les nourrir avec des jeux de données fiables et d’assurer une évaluation rigoureuse des informations analysées. Cela nécessite une collaboration étroite entre les experts médicaux, les chercheurs en sciences de l’information et les spécialistes de l’intelligence artificielle.
L’éducation et la prévention : des réponses durables
Au-delà des avancées technologiques, l’éducation et la prévention restent des moyens essentiels pour lutter à long terme contre la désinformation. L’Organisation mondiale de la Santé et les Nations Unies insistent sur l’importance de développer la littératie numérique et l’esprit critique chez les citoyens. Il est crucial d’apprendre au public à naviguer dans le flux constant d’informations, à identifier les sources fiables et à se méfier des informations non fondées.
Les professionnels de santé doivent également renforcer leurs compétences en lecture critique, notamment en ce qui concerne les études scientifiques. Même les experts peuvent parfois être piégés par des études biaisées ou mal construites. Une vigilance accrue et une analyse nuancée des données sont indispensables pour éviter de tomber dans le piège de mauvaises interprétations, surtout dans des domaines sensibles comme la santé mentale.
Une coordination internationale nécessaire
Face à la globalisation du phénomène, la lutte contre la désinformation en santé ne peut être menée de manière isolée. Elle nécessite une réponse coordonnée au niveau national et international. Les États doivent s’unir pour promouvoir des réglementations communes, renforcer la transparence des plateformes numériques, et responsabiliser les acteurs qui diffusent des informations trompeuses.
La loi promulguée en mai 2021 en France, visant à renforcer la lutte contre les dérives sectaires dans le domaine de la santé, représente une avancée dans cette direction. Elle sanctionne notamment la provocation à l’abandon ou à l’abstention de soins, ciblant directement les pratiques dangereuses. Cependant, cette législation doit être accompagnée d’une mobilisation plus large des institutions et d’une coopération accrue entre les États, notamment au sein de l’Union européenne, pour assurer des normes communes et une réponse concertée face à ce défi mondial.
Un phénomène complexe, une réponse multiple
La désinformation en santé est un phénomène complexe, aux ramifications multiples. Elle s’est amplifiée avec l’avènement des réseaux sociaux, mais des outils existent pour la contrer. Toutefois, la clé de cette lutte repose avant tout sur l’éducation, la prévention et la coordination internationale. L’accès à une information fiable et scientifiquement fondée est essentiel pour permettre aux individus de prendre des décisions éclairées en matière de santé, tout en protégeant la société des risques associés à la désinformation. La vigilance des soignants, l’implication des gouvernements et l’utilisation des nouvelles technologies forment ainsi le socle d’une riposte efficace face à ce fléau contemporain.
Adel Mebarki
CEO Foresight Data Agency
Co-animateur du Club Digital Santé