L’innovation appliquée à la santé a le vent en poupe. Le marché de l’e-santé pèsera 4 milliards d'euros en France…
Carte blanche à Eartha MADIBA DIN qui poursuit sa série d’articles dédiée à l’Afrique, le numérique et la santé avec ce mois-ci, un focus sur l’industrie pharmaceutique.
En préambule de l’Assemblée mondiale de la Santé à Genève, les Rencontres 2015 du LEEM avaient pour sujet la révolution numérique dans le domaine de la santé en Afrique1.
Si cette manifestation a réuni aussi bien des acteurs publics et que des acteurs privés, force est de constater que le syndicat français du milieu pharmaceutique en l’organisant se positionne comme un témoin clé de la mutation qu’est en train de vivre le continent africain en matière de santé, grâce à l’avènement du mobile. En 2016, ces mêmes Rencontres ont conclu sur le message suivant : la nécessité “d’inciter les Etats à investir dans les technologies mobiles” au service de la santé2.
Les chiffres de l’industrie pharmaceutique en Afrique
L’enjeu est colossal pour les industriels de la santé et plus particulièrement pour les laboratoires pharmaceutiques. D’après McKinsey, le marché africain serait “le seul où une véritable croissance est possible”2. De 4,7 milliards de dollars en 2003, la valeur du marché pharmaceutique africain a atteint 20,8 milliards de dollars en 2013 et pourrait atteindre les 65 milliards en 2020.
Comparé au 970 milliards de dollars du marché pharmaceutique mondial en 2013, le marché africain reste relativement petit mais est amené à croitre de manière exponentielle.
Les maladies chroniques prennent de l’ampleur sur le continent
A cela, on peut avancer une explication principale: l’augmentation de la charge des maladies chroniques et liées au vieillissement. En effet, leur incidence augmente alors que celle de pathologies virales et parasitaires qui sévissent dans la zone diminue3.
Le caractère chronique de ces pathologies induit des dépenses de santé élevées sur le long terme. Et les chiffres sont là : près de 650 000 nouveaux cas de cancer sont diagnostiqués par an4 et le nombre de diabétiques devrait passer de 14,2 million en 2015 à 34,2 million en 20405 dans la zone Afrique SubSaharienne.
Urbaine et de plus en plus sédentarisée, la population africaine – jeune, en croissance et connectée6 – représente une nouvelle cible à adresser pour l’industrie pharmaceutique, qui change de stratégie globale pour ce marché clé ; exemple avec le laboratoire AstraZeneca7.
Patients comme soignants se voient ainsi déjà offrir par les laboratoires, des services digitaux pour améliorer le dépistage, la prévention et la prise de traitements médicamenteux.
Exemple d’initiatives digitales menées par des laboratoires pharmaceutiques
Au milieu des années 2000, le board de Novartis avait déjà identifié le SMS comme LA solution technologique qui permettrait de pallier les ruptures de stock.
Avec le programme SMS for life – une collaboration public-privé dans le cadre de l’initiative Roll Back Malaria – le laboratoire Novartis s’attaque au challenge du dernier kilomètre de livraison de médicaments anti-paludéens8.
Le programme fonctionne de la manière suivante : une fois leurs coordonnées préalablement enregistrés, un message automatique de rappel est adressé chaque semaine aux centres de soins et aux personnels soignants.
En réponse, ces derniers renvoient un texto subventionné par le programme, sous forme de code, qui récapitule le niveau des stocks d’antipaludiques injectables et oraux.
Les informations collectées sont centralisées et permettent de prendre des décisions adéquates pour la commande et la livraison de médicaments.
Autre exemple avec Sanofi qui travaille pour sa part sur des solutions numériques dans l’aire thérapeutique du diabète. Au travers des partenariats avec plusieurs ministères de Santé publique en Afrique SubSaharienne et en collaboration avec de nombreux acteurs9 dont le RAFT et l’UNFM, le laboratoire français a mis en place le programme de formation en ligne “E-diabete”.
Depuis 2012, plus de 1500 professionnels de santé ont ainsi pu se former à un meilleur accompagnement dans la prise en charge des patients diabétiques10, au travers notamment de webinars animés chaque mois par des experts internationaux.
Plus récemment en 2015, Sanofi Diabète, l’UNFM et le RAFT ont rejoint Visiomed pour le lancement du Programme des Cliniques du Diabète connectées en Afrique. Le but de ce programme est le dépistage du diabète grâce aux dispositifs médicaux de santé connectée du fabricant français11.
Un dernier exemple avec le laboratoire Pierre Fabre dont la Fondation a soutenu et financé le pilote du projet “télédermatologie” au Mali12. Le laboratoire a par ailleurs mis en place un Observatoire de la e-santé dans les pays du sud, qui vise à “repérer les projets innovants et efficients”13 en Asie du Sud-Est, en Inde et en Afrique
L’Afrique constitue un marché clé pour les industriels de la santé et plus particulièrement pour les laboratoires pharmaceutiques. Nul doute que la liste de projets numériques s’allongera dans les années à venir tant la e-santé représente une opportunité pour ces acteurs de s’inscrire dans l’amélioration de la santé des populations.
Eartha MADIBA DIN
Alum ESSEC & UPMC
1Communiqué de Presse LEEM – La santé mobile pourrait sauver un million de vies en Afrique subsaharienne d’ici 2017- Mai 2015
2 Communiqué de Presse LEEM – E-santé et m-santé : un milliard de raisons d’inventer de nouveaux modèles de prise en charge des maladies – Mai 2016
2McKinsey – Africa: A continent of opportunity for pharma and patients – June 2015
3 En 2015 dans les 15 pays d’Afrique SubSahrienne les plus touchés par le paludisme ont vu l’incidence de la pathologie diminuer de 32%. Source OMS-Paludisme – Aide-mémoire N°94 -Avril 2016
4Santé: 10 choses à savoir sur le cancer en Afrique – Jeune Afrique – Février 2015. Source OMS.
5OMS – Diabète-Aide-mémoire N°312-Avril 2016
6 Article L’Afrique, le numérique et la santé – Janvier 2016. Sources: ONU 2012 et Journal du Net 2015 – International Telecommunication Union
7«Alors que l’industrie pharmaceutique a jusqu’ici mis l’accent sur la lutte contre les maladies transmissibles comme le paludisme en Afrique, des efforts doivent être déployés pour prendre en charge des maladies non transmissibles telles que le les pathologies cardiovasculaires».
«Plus de 50 % des décès sur ce continent devraient être causés par des maladies non transmissibles à l’horizon 2030». Tarek Rabah, Vice-Président du Groupe Astra Zeneca pour le Moyen-Orient et l’Afrique – Source Agence Ecofin – Février 2016
8Case Study: Sms for life (a): a public-private collaboration to prevent stock-outs of life-saving malaria drugs in Africa- International Institute for Management Development 2010.
9Ce programme a été développé par l’Université Numérique Francophone Mondiale (UNFM) en collaboration avec le Réseau en Afrique Francophone pour la Télémédecine (RAFT), l’université Senghor avec le soutien du laboratoire Sanofi – Source eburnews – Février 2016.
10Sanofi présente les résultats du partenariat de lutte contre le diabète et l’hypertension artérielle avec le Ministère de la Santé de Côte d’Ivoire – Source eburnews – Février 2016.
11Un déploiement d’envergure dans le dépistage du diabète – Source TheConnectedMag – Mai 2015.
12Site du Centre d’Expertise et de Recherche en Télémédecine et E-Santé (CERTES)
13Site de la Fondation Pierre Fabre